Guide CNIL 2024 de la sécurité des données personnelles

RGPD - Le guide pratique

La CNIL1 est sympa. Le gendarme français des données personnelles inflige (parfois) des amendes (modestes au regard de ce qu’autorise le RGPD) à ceux qui bafouent le respect de la vie privée et la sécurité des données personnelles. Enfin, quand elle ne fait pas de siestes trop longues2 ou ne fait pas preuve d’un laxisme éhonté comme le rapportait La Quadrature du Net en 20213. Mais globalement la situation s’améliore: en 2023, la CNIL a instruit 16 000 plaintes, procédé à 340 contrôles et prononcé 168 mises en demeure et 42 sanctions pour un montant de 90 millions d’Euros.

Elle publie également de nombreux guides à l’intention des particuliers, des professionnels et de la presse. C’est sous la rubrique Professionnels que la version 2024 du Guide CNIL de la sécurité des données personnelles est publiée.

Destiné en priorité à un public averti - Data Protection Officer, Chief Information Security Officer, juristes, mais également aux gens curieux de la préservation de leurs données, ce guide fournit des méthodes pour accompagner les organismes dans la mise en place de mesures de sécurité pour assurer la protection des données personnelles qu’ils traitent.

Divisé en 25 fiches thématiques, le document est un recueil de précautions qu’il est recommandé de mettre en place. La patte de l’ANSSI y est visible d’où son aspect plus technique que les publications habituelles de la CNIL.

Architecture

Le guide est divisé en cinq thèmes, sous forme de fiches:

  1. Les utilisateurs - le cadre, leur sensibilisation et formation, l’authentification, les habilitations;
  2. Le matériel - sécuriser le poste de travail, le mobile, les réseau et sites Web, les serveurs, encadrer le développement, garantir la sécurité physique des locaux;
  3. La maîtrise des données - les échanges avec les tiers, la sous-traitance, la maintenance et fin de vie des équipements;
  4. Anticiper les incidents - tracer les opérations, les sauvegardes, la continuité et reprise d’activité, la gestion des violations;
  5. Focus - l’analyse de risque, le chiffrement, hash et signature, le cloud, les applications mobiles, l’intelligence artificielle, les API

Chaque fiche est articulée en trois parties:

  • les précautions élémentaires ou encore ce qu’il faut faire ou ce qui peut raisonnablement être fait, aussi appelé RTFM4;
  • les mauvaises pratiques (bad boy, bad boy huh), ce que beaucoup d’entre nous probablement font;
  • les mesures complémentaires plus pointues, donc à l’intention des SecDevOps5 ou ce qu’il faudrait donc faire en sus du reste.

Un exemple - Chiffrement, hachage, signature

Fiche 21: Assurer l’intégrité, la confidentialité et l’authenticité d’une information, un exemple pris (pas tout à fait) au hasard de la façon dont une fiche est articulée:

Précautions élémentaires

  • Utiliser un algorithme reconnu et sûr:

    • SHA-296 ou SHA-397 comme familles de fonctions de hachage;
    • bcrypt, scrypt, Argon2 ou PBKDF2 pour stocker les mots de passe;
    • AES98 avec un mode de construction approprié (CCM, GCM, ou EAX) ou ChaCha2099 (avec Poly1305) pour le chiffrement symétrique;
    • RSA-OAEP100, ECIES-KEM101 ou DLIES-KEM101 pour le chiffrement asymétrique;
    • RSA-SSA-PSS100 ou ECDSA102 pour les signatures.
  • Utiliser des tailles de clés suffisantes :

    • pour AES, les clés de 128, 192 ou 256 bits sont considérées comme suffisantes;
    • pour les algorithmes basés sur RSA, il est recommandé d’utiliser des modules et exposants secrets d’au moins 2 048 bits ou 3 072 bits, avec des exposants publics, pour le chiffrement, supérieurs à 65 536 bits.
  • Appliquer les recommandations d’utilisation appropriées, en fonction de l’algorithme utilisé. Les erreurs d’implémentation ont un impact important sur la sécurité du mécanisme cryptographique.

  • Protéger les clés secrètes, au moins par la mise en œuvre de droits d’accès restrictifs et d’un mot de passe sûr.

  • Rédiger une procédure indiquant la manière dont les clés et certificats vont être gérés en prenant en compte les cas d’oubli du mot de passe de déverrouillage.

Ce qu’il ne faut pas faire

  • Utiliser des algorithmes obsolètes, comme les chiffrements DES et 3DES ou les fonctions de hachage MD5 et SHA-1.
  • Confondre fonction de hachage et de chiffrement et considérer qu’une fonction de hachage seule est suffisante pour assurer la confidentialité d’une donnée. Bien que les fonctions de hachage soient des fonctions « à sens unique », c’est-à-dire des fonctions difficiles à inverser, une donnée peut être retrouvée à partir de son empreinte. En effet, ces fonctions étant rapides à l’exécution, il est souvent possible de tester automatiquement toutes les possibilités et ainsi de reconnaître l’empreinte.
  • Hacher les mots de passe sans faire intervenir un sel.

Pour aller plus loin

  • Voir la page dédiée sur le site de la CNIL
  • L’ANSSI a publié des guides pour aider les développeurs et administrateurs dans leurs choix d’algorithmes cryptographiques, de dimensionnement et d’implémentation.
  • Lors de la réception d’un certificat électronique, vérifier que le certificat contient une indication d’usage conforme à ce qui est attendu, qu’il est valide et non révoqué, et qu’il possède une chaîne de certification correcte à tous les niveaux.
  • Utiliser des logiciels ou des bibliothèques cryptographiques ayant fait l’objet de vérifications par des tierces parties à l’expertise avérée.
  • Différentes solutions de chiffrement peuvent être utilisées, telles que:
    • les solutions certifiées ou qualifiées par l’ANSSI;
    • le logiciel VeraCrypt, permettant la mise en œuvre de conteneurs chiffrés;
    • le logiciel GNU Privacy Guard, permettant la mise en œuvre de la cryptographie asymétrique (signature et chiffrement).

Téléchargement

Le guide est disponible au téléchargement en français (.pdf-1.66Mo) ou English version (.pdf-730KB).


  1. Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés - cnil.fr ↩︎

  2. La CNIL s’est vue longtemps reprocher des délais de saisine trop longs. ↩︎

  3. Les GAFAM échappent au RGPD, la CNIL complice - La Quadrature Du Net ↩︎

  4. Read The Fucking Manual - xkcd ↩︎

  5. DevOpsSec, SecDevOps, DevSecOps: What’s in a Name? - Jamie Tischart, CSO Online ↩︎